
L'assurance-vie : une fiscalité à géométrie variable (mini-série sur l'assurance vie, épisode N°2/3)
Après avoir parcouru le fonctionnement et les intérêts de l’assurance-vie en 2025 dans notre précédent article, nous abordons aujourd’hui un aspect important dans la stratégie patrimoniale : sa fiscalité.
Avec plus de 2 000 milliards d’euros d’encours en 2025, l’assurance-vie reste le placement préféré des Français. Mais connaissez-vous réellement les subtilités de sa fiscalité ? Entre rachats et transmission, l’optimisation fiscale peut représenter plusieurs dizaines de milliers d’euros d’économie.
Mais de quelle fiscalité parlons-nous exactement ? Entre fiscalité des rachats et fiscalité successorale, les règles varient sensiblement.
Dans une logique de compréhension, nous nous concentrons sur les contrats souscrits après 1991. Pour les contrats ouverts avant cette date, qui bénéficient d’avantages spécifiques, nous vous recommandons de consulter notre post dédié : https://www.linkedin.com/in/matthieu-niverd-4239339b/
1. La fiscalité des rachats : une question de timing
En matière de rachat, la fiscalité ne s’applique que sur les gains (différence entre le montant retiré et les versements qui y sont associés).
Deux options s’offrent à vous
Face à l’imposition des gains, deux possibilités :
- L’intégration dans vos revenus imposables (soumis à votre tranche marginale d’imposition)
- Le prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) dont le taux dépend de l’ancienneté du contrat
Une fiscalité dégressive avec le temps
Le taux du PFL diminue avec l’ancienneté du contrat. Pour les contrats ouverts ou alimentés depuis le 27/09/2017 :
- Avant 4 ans : 12,8%
- Entre 4 et 8 ans : 12,8%
- Après 8 ans : 7,5% après un abattement annuel de 4 600€ (9 200€ pour un couple)
Dans tous les cas, les prélèvements sociaux de 17,2% s’appliquent sur l’intégralité des gains, sans bénéfice d’aucun abattement.
Un cas pratique pour illustrer
Prenons l’exemple de Monsieur Contribuable qui dispose d’un contrat ouvert il y a 10 ans sur lequel il a versé 200 000€, il souhaite récupérer 40 000 €.
Pour un contrat de 10 ans :
- Capital versé : 200 000€
- Valeur actuelle : 260 000€ (donc 60 000€ de gains)
- Rachat souhaité : 40 000€
Lorsque vous effectuez un rachat, vous récupérez une part de capital et une part d’intérêts.
Le calcul de la part imposable se fait donc selon cette formule : Part imposable = Montant du rachat × (Gains totaux / Valeur totale du contrat)
Donc : 40 000€ × (60 000€ / 260 000€) = 40 000€ × 0,2307 = 9 230€
La fiscalité s’applique uniquement sur ces 9 230€ :
Prélèvements sociaux : 9 230€ × 17,2% = 1 588€ de prélèvements sociaux à payer
Si option PFL
- Comme le contrat a plus de 8 ans, l’abattement de 4 600€ s’applique
- Montant imposable après abattement : 9 230€ – 4 600€ = 4 630€
- PFL sur le montant restant : 4 630€ × 7,5% = 347€
La fiscalité finale pour ce rachat est donc de 1 935€ (347€ pour le PFL + 1 588€ pour les prélèvements sociaux), soit seulement 4,84% du montant retiré.
Si option de l’intégration aux revenus imposables
Pour un contribuable soumis à la TMI de 41% :
- Comme le contrat a plus de 8 ans, l’abattement de 4 600€ s’applique
- Montant imposable après abattement : 9 230€ – 4 600€ = 4 630€
- Imposition sur le revenu : 4 630€ × 41% = 1 898€
Fiscalité totale de cette option : 1 898€ + 1 588€ = 3 486€, soit 8,72% du montant retiré.
Dans ce cas, l’option PFL reste plus avantageuse pour M. Contribuable (1 935€ contre 3 486€), lui permettant d’économiser 1 551€ d’impôts sur ce rachat.
2. La fiscalité successorale : l’âge clé de 70 ans
En cas de décès, la fiscalité appliquée aux capitaux transmis diffère radicalement selon l’âge auquel les versements ont été effectués.
Pour les versements avant 70 ans
Des règles claires :
- Abattement de 152 500€ par bénéficiaire
- Au-delà : 20% jusqu’à 700 000€ puis 31,25%
Prenons l’exemple de Madame Imposable qui a souscrit un contrat d’assurance vie à 65 ans sur lequel elle a versé 300 000€. À son décès, le contrat vaut 360 000€ (gains de 60 000€). Elle a désigné ses deux enfants comme bénéficiaires à parts égales.
Calcul pour chaque enfant :
- Part reçue par bénéficiaire : 360 000€ ÷ 2 = 180 000€
- Abattement par bénéficiaire : 152 500€
- Montant taxable : 180 000€ – 152 500€ = 27 500€
- Taxation à 20% : 27 500€ × 20% = 5 500€
Chaque enfant recevra donc 180 000€ – 5 500€ = 174 500€ net de fiscalité au titre de la transmission.
Pour les versements après 70 ans
Des règles claires :
- Abattement global de 30 500€ sur les primes versées
- Au-delà : application des droits de succession classiques
- Les gains restent exonérés
Prenons l’exemple de Madame Assujettie qui a souscrit un contrat d’assurance vie à 72 ans sur lequel elle a versé 300 000€. Elle n’a effectué aucun rachat sur son contrat. À son décès, celui-ci vaut 360 000€ (gains de 60 000€). Elle a désigné ses deux enfants comme bénéficiaires à parts égales.
Calcul global :
- Primes versées : 300 000€
- Abattement global sur les primes : 30 500€
- Primes taxables : 300 000€ – 30 500€ = 269 500€
- Gains totalement exonérés : 60 000€
Calcul par enfant :
- Part reçue par enfant : 360 000€ ÷ 2 = 180 000€
- Part des primes taxables par enfant : 269 500€ ÷ 2 = 134 750€
- Application du barème des droits de succession (en ligne directe) :
- 0 à 8 072€ : 5% = 404€
- 8 072€ à 12 109€ : 10% = 404€
- 12 109€ à 15 932€ : 15% = 573€
- 15 932€ à 552 324€ : 20% = 23 764€
- Total des droits par enfant : environ 25 145€
Chaque enfant recevra donc 180 000€ – 25 145€ = 154 855€ net de fiscalité.
La différence est significative : pour des paramètres identiques (300 000€ de versements, 360 000€ à terme, deux enfants bénéficiaires), l’écart de taxation entre les versements avant et après 70 ans représente 19 645€ par enfant, soit près de 40 000€ pour l’ensemble de la transmission.
L’assurance-vie offre un cadre fiscal privilégié, mais son optimisation nécessite une approche personnalisée. L’âge des versements, la durée de détention et le profil des bénéficiaires sont autant de paramètres à prendre en compte.
Notre équipe peut vous accompagner dans cette démarche d’optimisation, en tenant compte de votre situation personnelle et de vos objectifs patrimoniaux.