Donations pour l'immobilier : un dispositif éphémère d'exonération à saisir avant fin 2026

Article rédigé le vendredi 22 août 2025.

La loi de finances pour 2025, promulguée le 14 février dernier, introduit un dispositif inédit : l’exonération totale des droits de donation pour certains dons en numéraire destinés à l’acquisition d’un logement neuf ou à la rénovation énergétique d’une résidence principale. Une opportunité temporaire mais substantielle, assortie de conditions strictes qu’il convient de maîtriser parfaitement.

 

Un dispositif d’exception aux contours précis

 

Le principe : une exonération totale sous conditions

Face au mécontentement des professionnels de l’immobilier, le législateur a créé un abattement spécifique en matière de donations. Cette mesure temporaire et ciblée vise à soutenir l’accession à la propriété et la transition énergétique du parc immobilier français.

Montants concernés :

  • Jusqu’à 100 000€ par donateur individuel
  • Maximum de 300 000€ au total par bénéficiaire
  • Cumul possible entre plusieurs donateurs de la même famille
  • Aucun plancher minimum : les petites donations sont également éligibles

Durée limitée : Le dispositif s’applique aux sommes versées du 15 février 2025 jusqu’au 31 décembre 2026.

 

Les donateurs éligibles : un cercle familial élargi mais encadré

Le législateur a défini précisément les personnes habilitées à effectuer ces donations exonérées :

En ligne directe :

  • Parents biologiques ou adoptifs
  • Grands-parents paternels et maternels
  • Arrière-grands-parents

En ligne collatérale :

  • Oncles et tantes, mais uniquement s’ils n’ont pas de descendants directs

Cette restriction pour les oncles et tantes sans descendance vise à éviter que le dispositif ne se substitue aux transmissions en ligne directe et maintient la logique successorale traditionnelle.

 

Les projets éligibles : acquisition neuve et rénovation énergétique

Le texte de loi circonscrit strictement les utilisations possibles des fonds donnés :

Acquisition immobilière :

  • Acquisition d’un bien immobilier neuf ou en VEFA (Vente en État Futur d’Achèvement)
  • Logements collectifs ou individuels
  • Important : Le texte vise uniquement l’acquisition d’un immeuble neuf ou en VEFA. La construction de sa résidence principale par le donataire, lui-même, n’est pas une acquisition en l’état futur d’achèvement.

Important : L’acquisition d’un logement ancien (hors VEFA), les parts de SCPI, l’immobilier commercial et les résidences secondaires sont formellement exclus du dispositif.

Rénovation énergétique :

  • Travaux éligibles au dispositif MaPrimeRénov’
  • Amélioration de la performance énergétique du logement dont le bénéficiaire est propriétaire
  • Obligation de justifier l’amélioration énergétique effective

 

 

Les contraintes à respecter impérativement

 

L’obligation d’utilisation dans les six mois

Cette condition, particulièrement stricte, nécessite une préparation minutieuse et une anticipation parfaite des projets. Les fonds doivent être effectivement utilisés dans les six mois suivant le versement de la donation.

Cas pratique détaillé : Monsieur et Madame Contribuable souhaitent aider leur fils à acquérir un appartement neuf de 400 000€. Ils prévoient de donner 200 000€ (100 000€ chacun) en mars 2025.

Calendrier impératif :

  • Mars 2025 : Donation formalisée de 200 000€
  • Septembre 2025 au plus tard : Signature de l’acte d’acquisition ou engagement ferme des travaux
  • Justification documentée de l’utilisation auprès de l’administration fiscale

Risque majeur : En cas de dépassement du délai de six mois, l’exonération est définitivement perdue et les droits de donation redeviennent dus, majorés des pénalités de retard et des intérêts.

 

L’engagement de conservation de cinq ans

Le bénéficiaire doit s’engager formellement à occuper le bien en résidence principale ou le louer à usage d’habitation (hors membres du foyer fiscal) pendant au moins cinq ans. Cette condition vise à éviter les opérations purement spéculatives.

Implications pratiques détaillées :

  • Occupation personnelle en résidence principale acceptée
  • Location à des tiers hors foyer fiscal autorisée
  • Interdiction de louer à un membre du foyer fiscal
  • En cas de non-respect, reprise intégrale de l’exonération avec pénalités

 

 

Pour bien comprendre l’impact des différents plafonds :

 

Maximiser les montants par la combinaison des donateurs

Exemple d’optimisation complexe : Famille élargie avec deux parents et quatre grands-parents vivants.

Calcul théorique des montants mobilisables :

  • Parents : 200 000€ (100 000€ × 2)
  • Grands-parents paternels : 200 000€ (100 000€ × 2)
  • Grands-parents maternels : 200 000€ (100 000€ × 2)
  • Total théorique : 600 000€

Limite réglementaire incontournable : Plafond absolu de 300 000€ par bénéficiaire, quels que soient le nombre et la qualité des donateurs.

 

Coordination avec les abattements classiques : une opportunité à sécuriser

Le texte de loi ne prévoit pas expressément ce cumul avec les abattements traditionnels de 100 000€ par parent et enfant renouvelables tous les quinze ans. Il est admis en pratique, mais reste à sécuriser au cas par cas.

Stratégie théoriquement envisageable : Un couple pourrait potentiellement transmettre à son enfant en 2025 :

  • 300 000€ au titre du nouveau dispositif (totalement exonéré)
  • 200 000€ au titre des abattements classiques (exonéré sous réserve de disponibilité)
  • Total théorique : 500 000€ sans droits de donation

Attention cruciale : Cette optimisation reste en pratique envisageable mais doit impérativement être sécurisée dossier par dossier, en fonction des donations antérieures, du respect des délais de quinze ans pour les abattements de droit commun et de la situation familiale spécifique.

 

Timing et fractionnement stratégique

Fractionnement temporel intelligent : Étaler les donations entre 2025 et 2026 permet d’optimiser la trésorerie familiale tout en respectant scrupuleusement les délais d’utilisation de six mois.

Coordination familiale : Organiser les donations successives en fonction des projets échelonnés des différents enfants pour maximiser l’efficacité globale du dispositif sur l’ensemble de la famille. Attention aussi au risque d’une rupture d’égalité entre les enfants.

 

 

Les pièges à éviter absolument

 

L’utilisation non conforme des fonds

L’administration fiscale sera particulièrement vigilante sur l’affectation réelle et exclusive des sommes. Les fonds doivent être parfaitement traçables et exclusivement affectés aux projets éligibles.

Erreurs à éviter :

  • Mélanger les fonds donnés avec d’autres ressources personnelles
  • Utiliser même partiellement les sommes pour d’autres dépenses
  • Reporter l’utilisation au-delà de la limite impérative des six mois
  • Acquérir un bien non conforme aux critères d’éligibilité

 

La qualification précise des travaux de rénovation

Seuls les travaux strictement éligibles au dispositif MaPrimeRénov’ bénéficient de l’exonération, ce qui nécessite une vérification préalable minutieuse.

Travaux éligibles au dispositif MaPrimeRénov’, tels que l’isolation thermique, l’installation de pompes à chaleur ou de panneaux solaires. La liste exacte dépend des critères en vigueur au moment de la réalisation des travaux.

Travaux non éligibles (exemples) :

  • Rénovation purement esthétique sans impact énergétique démontré
  • Extension, surélévation ou agrandissement
  • Équipements de confort non directement liés à la performance énergétique
  • Aménagements paysagers ou extérieurs

 

La justification administrative rigoureuse

Le contribuable devra impérativement justifier de l’utilisation parfaitement conforme des fonds par une documentation exhaustive. Il convient de constituer et conserver un dossier complet comprenant :

  • Actes d’acquisition notariés avec mentions spécifiques
  • Factures détaillées de tous les travaux réalisés
  • Certificats et diagnostics de performance énergétique
  • Preuves de paiement nominatives et datées
  • Justificatifs de l’occupation ou de la location du bien

 

 

Perspectives et recommandations stratégiques

 

Un dispositif purement fiscal : 

La donation peut être simplement déclarée auprès de l’administration sans avoir recours à un notaire. Il s’agirait d’un « don manuel ». Cette donation faisant l’objet d’un rapport lors de la succession à leur valeur au jour de cette succession, il convient donc d’en valider précisément les conséquences. Ainsi cela permettrait d’éviter un éventuel conflit entre les héritiers.

Une opportunité exceptionnelle à saisir sans délai

Avec une échéance définitive fixée au 31 décembre 2026, les familles potentiellement intéressées disposent d’un délai limité pour identifier, structurer et finaliser leurs projets d’optimisation. Cette contrainte temporelle est d’autant plus serrée que l’opération nécessite une anticipation des conséquences à long terme et une organisation familiale rigoureuse.

Calendrier recommandé :

  • 2025 : Identification précise des projets familiaux, structuration juridique optimale, préparation documentaire
  • 2026 : Finalisation opérationnelle de toutes les opérations avant l’échéance définitive

 

L’accompagnement professionnel spécialisé est indispensable

La complexité technique du dispositif, les risques substantiels de requalification fiscale, les enjeux familiaux et financiers considérables rendent l’accompagnement par des professionnels spécialisés plus que recommandé : il est indispensable. Les montants concernés justifient largement cet investissement de sécurisation.

Points de vigilance professionnelle prioritaires :

  • Anticipation des conséquences des donations lors de la succession
  • Respect scrupuleux et documenté des conditions temporelles strictes
  • Traçabilité parfaite et exclusive de l’utilisation des fonds donnés
  • Constitution d’une documentation exhaustive pour l’administration fiscale
  • Vérification préalable rigoureuse de l’éligibilité des projets (neuf/VEFA/travaux MaPrimeRénov’)
  • Optimisation de la coordination avec les autres dispositifs fiscaux disponibles

 

Une mesure révélatrice de la politique fiscale contemporaine

Ce nouveau dispositif, aussi techniquement intéressant soit-il pour les familles bénéficiaires, illustre parfaitement l’approche caractéristique de la fiscalité française contemporaine : privilégier systématiquement des avantages fiscaux ciblés et temporaires plutôt que d’entreprendre une réforme structurelle et durable des barèmes généraux. Une stratégie politique qui permet habilement de concilier objectifs de communication gouvernementale, contraintes budgétaires et incitations sectorielles spécifiques, tout en imposant aux autres acteurs économiques les efforts financiers que l’État refuse catégoriquement de consentir sur ses propres revenus fiscaux. De la communication plutôt qu’une réflexion à long terme.

Pour les familles concernées, l’enjeu stratégique est parfaitement clair : identifier rapidement les projets éligibles et structurer optimalement les transmissions patrimoniales avant que cette fenêtre d’opportunité exceptionnelle ne se referme définitivement.

Notre équipe de spécialistes reste intégralement à votre disposition pour vous accompagner dans l’analyse approfondie de vos projets familiaux et l’optimisation maximale de ce dispositif exceptionnel avant son expiration programmée.

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